Légendes documents
D1 : Photographie d’une structure de mousse de savon vue de l’intérieur, Florence Elias, 2012
D2 : Cellule de Williams, forme type des bulles de mousse monodisperses d’après observation, 1961
D3 : Polyèdre de Kelvin, polyèdre semi-régulier constituant le pavage idéal de bulles monodisperses, 1887
D4 : Polyèdre de Weaire-Phelan, combinaison de deux polyèdres semi-réguliers optimisant le pavage de bulles monodisperses,1994
La manière dont on se figure les structures du monde physique détermine les représentations du monde psychique. Depuis l’antiquité jusqu’à la fin de la période renaissante, le macrocosme et le microcosme, l’univers et l’individu son régis par les mêmes principes, correspondances qui attestent de l’harmonie du monde. Même si ces théories sont entérinées depuis longtemps, l’imaginaire collectif continue de partir des dernières théories astrophysiques et des modèles mathématiques qu’elles emploient pour se figurer la structure de l’esprit et les forces qui le régissent.
Il est ainsi possible d’établir une typologie des formes que l’on a pu attribuer aux instances de la pensée et qui correspondent à l’évolution des théories concernant la structure du cosmos. Depuis la géométrie euclidienne au moyen de laquelle on décrivait le mouvement des corps célestes et les polyèdres réguliers qui régissaient les cinq éléments de la physique antique, de nombreuses théories se succèdent et coexistent, empruntant leurs modèles entre autres à la théorie des champs, à la géométrie hyperbolique, aux structures fractales ou à la topologie des surfaces.
Parmi elles, l’étude des surfaces minimales, surfaces fermées, à bords réguliers et dont l’aire est réduite au maximum, notamment employée pour décrire la structure des bulles et des mousses, offre des exemples de pavages optimaux, s’approchant de formes idéales, et inspirant des modèles cosmologiques nouveaux. La bulle est aussi liée au motif de l’orbe lumineuse qui figure les manifestations de l’âme depuis l’antiquité. Trouvant des résonances nouvelles, le motif des structures de bulles de mousse sera particulièrement employé dans les représentations mystiques des années soixante, déployant un imaginaire formel qui nous habite encore.
Réalisées à partir de mousses polymères et autres dérivés du pétrole, la série des Matrices polymères montre comment les propriétés physiques de matières organiques peut générer un univers de formes aussi bien invoquées pour formuler des théories cosmologiques que des représentations ésotériques. La seule mise en tension des matériaux, par étirement ou compression, ici au moyen d’un fil de nylon, matérialisent des structures idéelles. Dans cette pièce, les motifs imposés au matériau reprennent la structure même du matériau qui repose sur un nombre fixe de jonctions. Ils mettent en évidence un déplacement d’échelle.